Monday, July 28, 2014

Cartons des Alizés
















Les matières se déplacent, d'un pan du ciel abandonnique à l'autre
Leur nécessité, leur valeur sont à soupeser d'un seul geste
Vite
De fond en comble, la vêture vole et les pages des livres qui me lieront
L'enveloppe qui me précédera sur la route des cannes à sucre et des bananes vertes
Les couleurs en sont chaudes, les anticiper et les plier dans des boîtes
C'est un dépeçage sans vigueur, une mathématique versatilité
Les yeux encore fermés, la quotidienne eutrophisation de l'inconnu et le fil du vertige
Le poids des rêves parfaitement gratuits est toujours plus lourd que l'air que l'on se donne.


La Martinique, moins  quatre-vingt-neuf jours

Avril 2012

  Fin de la Première Saison



L'Abbaye aux Dames





 






Un devoir : apprendre tout ce qui va rester
Le sifflement des nids, la laque pastel d'Avril, l'air mouvant mais assez sage
Dans les lignes si précises de la vision le bercement de la mémoire
Les clochers, les clochers
Une dizaine de siècles à repousser de soi
C'est une tâche inconnue, anticiper l'oubli
Ou la nostalgie ou l'indifférence
Le poids dans mes gènes curieux de ce temps magistral
Ce temps maternant des pierres qui enveloppa chacune des ruptures
L'architecture seule, notre immortalité bienveillante
Les yeux vont plus loin il semble
Afin d'enrouler les contours de l'immobile qui dure et siège haut
Embarquer, avec le torse des abbayes ouvert aux nomadismes
Point d'ancrage imposant de la nécessité, borne amarrant les défilés de l'éphémère
Garder donc, pour le maintien d'une hydratation convenable
Embrumé mais silencieusement disponible
Le tempo hiératique des arcs-boutants








Avril, le premier, 2012





Ne plus revoir ma Normandie










 
Par couches ténues
Du bout des ongles
L'écaillage des lieux
Quitter radicalement le temps forclos et ses écumes
Les regards connus jusque dans l'effacement
Qui tapissent la mémoire des feuilles couvertes toutes
De codes incertains
Mais fondateurs
Adieu
Ici et là 
Tenter de ne rien omettre de ce qui s'abandonne
Entre les mains de ceux qui m'ont croisée
Quand je me posais entre leurs noeuds 
Sans bruit
J'emmène à mes côtés sous les chaleurs
Le gris trompeur des sédiments épars
Mais sûrs
Ces indivis de l'arborescence normande à qui
Toutes ces années j'ai dit
A chacun de mes jours
Bonjour
Un à un
Un à un je leur offre
Le long de ces mois tendus sous l'imparfait
Toutes ces années
A ceux qui ont bordé ma vie tant d'années
La gratitude









 



Mars 2012










La ville affreuse




 










Il s'agira
De traverser encore et de part en part
Un lieu où je ne serai déjà plus
Il s'agira
D'aller encore, le regard liquide
Mais se heurtant quand même aux limites et à leur prédictibilité
Il s'agira
D'en finir
Même dans le départ encore qu'allongés sur le dos, murs et cieux
La glaciale indifférence et la déchirure des appuis
C'est fait et immobile
Le départ
La ville affreuse est en instance
L'attente et la conviction débordante de la nécessité
Le départ
Jusqu'à ne plus pouvoir sentir
Aucune de nos anciennes rumeurs communes
Absente, absente
Astreinte aux dépassements, murs et rues 
Connus jusqu'à la sève
Je retire ce que j'ai dit
Le lien s'est tu aux angles des passages
Je conduis yeux fermés sur le temps qui reste, murs et passants
Passant à autre chose
Qui n'est pas là encore mais occupe tout le sol de mes songes
Il s'agira 
De tracer sur cette transhumance qui n'en finirait plus
Une ligne bien claire
La marque des déchirures
La nécessité des exils
Trompeurs ou pas
L'hydratation des muqueuses sacrées
Les pulsations des rencontres
L'étranger bienfaisant
L'impeccable de partir
Enfin




Caen, Février 2012








Rue Bleue















Ce matin est sans tenue
Défilé étroit des images biaisées par les ans
Un jour, toujours comme un autre
Comment s'appuyer contre les marches du temps ?
Travail, patrie, rudesse des parcours connus comme les doigts
Le rythme est absent de la surface
Les heures passablement désenchantées
Est-on donc toujours en Novembre ?
Les lointaines envergures sont suspendues dans l'invisible
Travail, chemin inamovible du trajet
A noyer tous les agendas du monde dans un verre d'eau
L'allure est molle, le pas sournois
Est-on encore demain ?
La plaine grasse s'étend sans lien, on s'endort les paumes ouvertes
A croire que le temps est accolé au trajet qui recule
Faute de mener quelque part
Là–bas vers certains des penchants
Qu'on inscrirait volontiers les yeux fermés
Au programme implacable des exaltations.






Un jour de Janvier  2012






Lugdunum




 










Il en sera ainsi
Courbe oubliée, mauvais pli
Une statue qui baillait
Et puis c'est tout
La limite est inscrite à blanc sur chacun des bancs de pierre
Mais elle se tait
Les jeux montaient avec l'envie vers les mêmes cieux épanouis mais assez sourds
Les mêmes cris, les mêmes cris, des siècles de cris
L'homme du présent fouille et s'exclame
Puis doucement il meurt
Il disparaîtra
Dans la brume percée par le funiculaire
Il cessera tout à coup de devoir penser qu'il sait
Les jours de gloire sont tous dispersés
Battant la chamade et l'ignare fer rougi
Lyon respire
Ni mieux, ni plus loin
L'homme du présent la voulait immortelle
Elle l'est




Décembre 2011



Sculpter le temps















Hommage à Etienne- Martin


Place aux élancements !
D'un étonnement le poids et sa lumière s'extirpent et l’œuvre massive de l'enfantement
Caché sous ses yeux qui palpent la véhémence de la matière
Il laisse passer le Rhône, accoutumé comme lui aux lois démesurées du hasard
Sous les mandibules de ses rejetons, la terre est à gauche
Le plâtre à peine
Et les couleurs
On s'incline
Saturés et lourds de cette nécessité de voir. 




Décembre 2011
Rétrospective Musée des beaux-arts de Lyon

Cartons des Alizés

Les matières se déplacent, d'un pan du ciel abandonnique à l'autre Leur nécessité, leur valeur sont à soupeser...